Semaine 6 : James Blake - James Blake [R&S]



Le voici, le tant attendu premier album de James Blake. Après quatre Ep, le petit prodige Anglais passe enfin au format long avec un disque pour le moins étonnant. On arrête le débat tout de suite, si cet album éponyme est étonnant, ce n’est pas parce qu’il est révolutionnaire mais tout simplement parce qu’il sort du sentier dans lequel on l’avait connu. Jusqu’ici, James Blake était à ranger dans la case dubstep ou post-dubstep où le musicien, en quelques compositions, jouait de sa voix sur des musiques purement électroniques. Il y avait dans ses deux derniers Ep une beauté évidente et une construction soignée dans l’évolution des morceaux. Ainsi, CMYK, son apothéose discographique écrivait en 4 morceaux une musique à la fois belle et étrange, faites de coupures incessante et où la voix du jeunot ne cesser de muer.

Ce premier album est en quelque sorte une suite logique de son dernier EP Klavierwerke. La musique y est plus introvertie, plus hésitante et plus posée. Ce n’est pas pour autant que l’on a le droit à un Klavierwerke 2, loin de là. James Blake évolue dans la même sphère mais y atteint son extrême. Dans ce premier essai, la musique y est aussi importante que les longs silences qui ponctuent ses compositions. Contrairement à Klavierwerke, James Blake s’éloigne encore un peu plus du genre électro. S’il en garde quelques singularités (la voix trafiquée, les beats, les synthés), on le classera plus près d’un nouveau Antony Hegarty que d’un Burial. La principale évolution vient en effet des morceaux à la structure plus classique comme cette reprise de Feist qui fait office de premier single avec Limit To Your LoveJames Blake se pose en chanteur R’N’B sur une musique teintée de soul rythmée par des beats certes discrets mais faisant vibrer nos tympans par leurs profondeurs.

Classique dans le fond (on pense à une multitude d’artistes), la forme est des plus étonnantes. Tout dans ce disque est épuré et minimalisé laissant pleinement la voix s’exprimer sous toutes ses formes. Ainsi Linesfarne I est sans instrument tandis que sa suite se retrouve accompagnée d’une simple guitare acoustique. Aucun doute, la pièce maitresse de ce disque est la voix. Jusqu’ici, James Blake l’avait habillé d’une multitude d’effets sur ses précédents EPs, sûrement par pudeur, mais les mois ont passé et le Londonien a gagné en assurance au point d’en jouer. Ainsi, on découvre sur To Care (Like You) une habile construction de voix plus ou moins aigues se répondant pour construire une musique des plus originales. Il n’hésite pas aussi à nous la faire découvrir nue, sans effets, dévoilant un organe étonnamment mature et maitrisé (Limit To Your Love).

Enfin, ce disque est aussi celui du vide. Rarement on aura entendu autant de silences, James Blake suspend le temps en attente des prochains mots qu’il daignera nous chanter, des prochaines notes qui nous ferons vibrer. Ce qui pourrait s’avérer ennuyeux est pourtant captivant. L’album est chargé d’une ambiance si particulière, tel un brouillard opaque qui nous laisserait apparaitre les contours d’un paysage au fur et mesure que l’on avance.

Des reproches on pourrait lui en faire plein, le gamin peut avoir tout le talent qu’on peut penser, le manque d’expérience se fait cruellement ressentir tant chaque chanson ressemble à tel ou tel artiste. Il n’hésite d’ailleurs pas à signer deux reprises (réussies) sur ce premier album (Wilhelms Scream et Limit To Your Love). Mais l’on garde en mémoire les bons côtés de ce disque qui garde une certaine singularité, les limites que semble s’être fixé son créateur (minimalisme, économie des notes…) permet de garder une cohérence tout au long du disque. C’est surtout un album qu’Antony Hegarty aurait du sortir il y a trois ans mais qu’il a été incapable de réaliser, car cette œuvre éponyme est à la fois curieuse, surprenante et poétique. Rien que pour cela, on remercie James Blake pour cette plongée dans un monde où l’on s’immerge que trop rarement.



sortie le : 07 février 2011
5 titres en écoute à droite.
Myspace

Pour :
Les chroniques de Blake
Hop
Sound Of Violence
Esprits Critiques
Feu à volonté
Arbobo
Des oreilles dans Babylone
C'est entendu
Little Reviews
...

Contre :
Brainfeeders & Mindfuckers
Chroniques Electroniques
...




8 commentaires:

Joris a dit…

Tiens je ne savais pas que Wilhem Scream était une reprise, de qui est l'originale ?

Panda Panda a dit…

Un certain James Litherland...

http://soundcloud.com/imranahmed/james-litherland-where-to-turn

Mmarsupilami a dit…

Eh petit Panda, tu m'oublies. Je crois pourtant qu'on est parmi les seuls à faire ce lien avec Antony...
http://mmarsup.blogspot.com/2011/02/james-blake-james-blake-8310.html

Panda Panda a dit…

Oublie corrigé! Par contre la comparaison avec Antony faudra que tu m'expliques, ta chronique non seulement d'être juste drôle et originale m'a donné faim!

Mmarsupilami a dit…

Ben oui, Antony Hegarty. Je trouve que cet album est un étonnant cross-over entre Antony et Hit Chip (fin d'article)...

Joris a dit…

Non je crois que j'ai déjà vu quelques articles qui faisaient référence à Antony (dont le mien ^^). Par contre, Hot Chip je vois pas... J'connais pas beaucoup non plus remarque.

Blake a dit…

bon, en fait malgré l'idée reçue, le panda est un animal très courageux ... puisqu'il a fait la liste de tous les blogs qui ont défendu ou attaqué l'album de James Blake.
Je ne doute pas que le panda sache aussi compter, et il remarquera qu'il y a d'ailleurs plus de "pour" que "de contre" ;-)

Quand même parfois, le monde tourne rond ;-)
(et merci pour le lien !)

Panda Panda a dit…

@Mmarsu : c'est écrit tout pitit aussi... Comme Spiroid, la comparaison avec Hot Chip me laisse assez perplexe!
@Blake : Hé ouai je suis pas un rigolo, je pense en avoir loupé mais bon au bout d'un moment, c'est un poil lourd... Pas mal d'avis "pour" mais j'ai lu aussi sur des forums pas mal d'avis "contre". Brainfeeders et chroniques élec ne sont pas seuls!