Jour 1 : Mon fist, ma bataille.


3 trains, 1 voiture soit 5h30 de trajet auront été nécessaires afin de rejoindre la Mecque des festivals Breton, on parle bien sûr de La Route du Rock qui fêtait ses 23 bougies cette année. A l'occasion de cet anniversaire les enjeux étaient grands, il faut dire que l'année dernière les organisateurs n'étaient pas forcément à la fête avec une édition qui avait fait un four. Entre vieilles gloires et groupes peu reconnus pour leur entrain, la programmation avait fait fuir les festivaliers à raison. Sans être une catastrophe, les soirées s'étaient avérées plutôt chiantes. Heureusement, notre prière a été entendue et cette 23ème édition promettait sur le papier en se concentrant sur des groupes plus actuels. A l'exception de Nick Cave (qui n'est pas un artiste sur le retour non plus), les groupes dénichés étaient principalement issus des années 2000. Plus simplement, cette prog avait de la gueule. Pas trop de folk mou du genou, pas de geignards. Enfin ça faisait envie quoi! Même la pré-soirée du mercredi avec entre autre Clinic (Et Julia Holter et Austra si vous voulez tout savoir) faisait plus qu'envie mais bon ne sachant pas où loger (le camping était il ouvert?) on fait l'impasse.

On déboule donc sur la plage vers 16h et des brouettes pour Orval Carlos Sibélius qui fait pas mal parler de lui cette année avec Super Forma, une odyssée psychédélique et orchestrale qui nous a laissé sur notre faim mais qui nous a donné envie d'y replonger à l'écoute de ce concert qui aurait mérité sa place au fort Saint Père. Avec ses petits copains, le parisien Axel Monneau envoie des chansons pop virevoltantes qui prennent de l’ampleur quand le trombone et le synthé s'en mêlent. Pas très loin d'un Robert Wyatt en plus bondissant, cet artiste qui en est déjà à son troisième album solo n'a pas menti à sa réputation. Entraînant et réjouissant on fait l'impasse sur une petite bière qui nous aurait bien rafraîchi après le trajet en voiture pas trop climatisé pour ne pas perdre une miette de cette prestation qui ouvre à merveille les festivités.

Le temps de se remettre de ce premier concert plutôt jouissif, on part vers la voiture garé à perpette pour rejoindre le camping, quelques courses plus tard il est temps de prendre la route qui fut oh combien encombrée... après moult bouchons, il était presque 19H30 lorsqu'on arrive sur le site. Le temps de récupérer le pass, d’installer la tente, de manger un coup, de boire un verre avec les copains, autant vous dire qu’on n'a pas été très sérieux ce soir là… On ne peut que conseiller aux futurs visiteurs du port d’utiliser la navette qui connait les bons plans pour éviter toutes ces foutues routes encombrées ou d’avoir un GPS qui vous fera fuir les axes les plus utilisés. Néanmoins malgré ces astuces, il vous sera toujours difficile d’assister au premier concert de la soirée tant le timing est très serré.

Bon on ne va pas vous la faire à l’envers, on a loupé pas mal de choses on aurait pu débarquer pour Local Natives (disponible sur Arte Live Web) mais l’idée d’assister à une heure de pleurnicheries et de simagrées nous a complètement coupé la chique (On a déjà parlé en mal de l’album et d’un live donc on ne va pas non plus abuser des mauvaises choses). Des concerts loupés, on regrettera surtout la pop sous psychotropes de Jacco Gardner et le punk brûlant d’Iceage dont nous allons tout de même vous parler grâce à Arte Live Web (oui, ça commence dans la honte cette chronique) qui sont toujours dans les bons coups ceux là. Quand à Moon Duo, pas de regrets puisque l’album à tendance rock psyché (ha oui c’était psyché cette année!) ne nous a pas fait sauter au plafond et la prestation du duo n’était parait il pas forcément convaincante.

Iceage donc. Malgré un concert fastidieux avec quelques problèmes techniques, les jeunes bambins de Copenhague ne font pas mentir leur réputation de petits cons énervés. Pendant 40 minutes, les guitares hurlent autant que le chanteur qui multiplie les poses faussement indifférentes. Drôle de décalage de voir ce groupe qui semble mener une vie nocturne à une heure si tôt, le soleil mettant un peu plus leur pâleur nordique en évidence. Au final le concert se regarde avec beaucoup de plaisir même si l’on est conscient qu’un groupe de cette catégorie ne peut se permettre de jouer plus d’une heure sans cramer les neurones des festivaliers. Histoire de mettre tout le monde sur les rotules, Iceage clôturera sur le désespéré et rageur Morals avant d’enchaîner avec le très nerveux Ecstasy soit leurs deux meilleurs morceaux. De quoi te poser un groupe.
Concert disponible sur Arte Live Web.

Ellipse de malade et paf il est déjà 22h45 quand Nick Cave & The Bad Seeds rentre sur scène. La question qui nous trottait dans la tête est s’ils allaient nous bluffer une nouvelle fois après leur prestation à Porto où allait-on assister à une resucée de ce concert, la surprise en moins. Et bien non, l’introduction a beau être la même, cette façon d’occuper la scène aussi, le groupe impressionne toujours. Les affreux entament avec We No Who U R puis Jubilee Street avec une fougue faisant oublier leur âge avancé. Nick Cave lève la foule (Nick dans le public, Nick debout sur la barrière, Nick qui mouline avec ses bras…), et fascine. Le groupe se permet même quelques changements mineurs dans sa setlist (4 titres sur 11 étaient différents) en privilégiant toujours les tubes et le dernier album mis à l’honneur encore une fois. Parcouru d’une nervosité et d’une tension permanente, il y a quelque chose de rare qui se dégage des Australiens. Au-delà des compositions, on retient cette prestance qu’on aura rarement vue chez un groupe. Maintenant on le sait Nick Cave & The Bad Seeds est comme un (très) bon film, on sait comment ça se passe mais on prendra toujours autant de plaisir à le revoir, une valeur sûre.

Puisqu’on a un peu de temps avant !!! on en profite pour choper des jetons et prendre une bière. Il faut croire que sa qualité va de pair avec l’affluence puisqu’elle nous a semblé beaucoup moins diluée que l’année dernière! Avant que le concert débute on en profite pour voir le stand "Les Gérards" situé derrière la régie. Sévissant dans la région depuis quelques temps et plusieurs années à La Route du Rock, ces petits rigolos ont droit à une mise en avant pas dégueulasse. Adepte des jeux de mots foireux et souvent graveleux ("mon fist, ma bataille", "Bambi is a son of a biche", "boire ou conduire, rien à foutre je rentre en poney" et autres joyeusetés…), "Les Gérards" font rires, c’est déjà pas mal.

Bon, faut l’avouer, !!! (Ça se prononce tchik tchik tchik) ont du boulot pour égaler le père Nick. C’est même pas possible en fait et ça va se vérifier dès le début. Loin d’avoir proposé un concert chiant, nul ou horrible, l’énergie incroyable du chanteur ne suffira pas alors que ça aurait sûrement fait son petit effet à un autre moment. Ce n’est pas faute de se démener pourtant! Affublé d’un mini short coloré, le chanteur se dandine de chaque côté de la scène en répétant ses chorégraphies imparables. Le problème vient surtout des mélodies absentes et la désagréable sensation d’entendre toujours le même titre. !!! a finalement le rythme sans la musique. 30 minutes auraient suffi, l’heure entière qui leur est alloué va nous permettre de nous rendre compte que le groupe généreux, finit par tourner à vide. Sans être désagréable, le concert ce sera avéré sympa sans être transcendant.
Concert disponible sur Arte Live Web.

Terminé, on file sur la petite scène voir Electric Electric vendu par les petits copains comme géniaux. On se faufile sans trop de mal vers la petite scène (ce sera la seule fois où on n’aura pas trop de mal à se faufiler d’ailleurs…) qui est d’une autre envergure que les trois bouts de planches de l’année dernière QUAND MÊME. Quand on s’approche de la scène, le trio a déjà commencé et il faut avouer que ça cogne sévère. Comme des Battles enragés, ils représentent un Math-Rock à la Française avec une énergie débordante. Enfin, là c’est même plus de l’énergie, c’est une rafale. Electric Electric envoie des uppercuts au public comme on distribue des petits pains. Tandis que le batteur frappe comme un beau diable, on s’abandonne dans ces boucles synthétiques et ces déflagrations de guitare. Le groupe est d’une précision remarquable accentuant encore cet aspect martial et fou qui transpire de leur musique. Malheureusement le set nous aura paru beaucoup trop court et il est déjà temps de filer sur la grande pour voir le dernier concert de la soirée : Fuck Buttons.

Comme Nick Cave, Fuck Buttons fut une des grosses claques du festival Primavera à Porto, tout le monde l’ayant mis dans son top 2 (excepté Bobby Love qui dormait…) autant dire qu’on les attendait de pied ferme. Cette fois ci, pas question de louper le début du set, on est déjà devant alors que le groupe n’a pas encore commencé. Débutant sur le tonitruant Brainfreeze avec sa batterie mémorable, on rentre directement dans le bain. A travers des projections vidéo hypnotiques on se laisse embarquer par ce duo qui a su en trois albums imposer sa marque de fabrique dans le milieu électro et au-delà. Et quoi de plus agréable que de voir un groupe alors en promo pour leur dernier et excellent album Slow Focus, que de s’attarder autant sur ce dernier que Tarot Sport sommet de leur discographie? On se réjouit en particulier d’entendre Surf Solar, hymne hypnotique, à la fois aquatique et aérien, une berceuse énervée, une ballade épileptique bref, un classique qui vous fait passer dans tous les états. Encore une fois, l’heure passe à une vitesse folle, transcendé par la musique des deux Anglais qui nous offre une jolie setlist best-of parfaitement maîtrisée.
Sur ce on rentre au camping pour un petit digestif bienvenue, des étoiles encore pleins les yeux, la musique de Fuck Buttons en tête et des autres aussi qui ont réussi à nous faire oublier l’édition précédente pas folichonne pour un sou. En une soirée, La Route du Rock a remonté la pente et atteint le même niveau d‘exigence et de qualité qu’il y a 3 ans lors de leur 20ème anniversaire.

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