Jour 2 : Galettes saucisse et groupes de la mort qui tue.


C’est comme une fleur qu’on se lève au camping de La Route du Rock. On zappe la toilette toujours facultative en festival pour partir sur Saint Malo. Surtout que l’attente est en général interminable donc oui, autant s’abstenir. Préférant prendre la voiture plutôt que la navette qui avoisine les 40 minutes d’attente (pas confirmé), on part vers la grande ville non sans galérer pour se garer. Finalement le temps de trouver une place et de rejoindre la cité historique (charmante en tout point), les 40 minutes gagnées seront perdues, raison de plus pour prendre la navette. Après s’être fait baladé par une policière qui nous a envoyé à l’opposé, on trouve enfin le théâtre Chateaubriand où se passe la conférence de Christophe Brault sur le Rock Garage. Le temps est idéal (ça crachouille un brin) pour poser ses fesses dans un siège confortable. On est bien, il fait chaud, la situation aurait été idéale pour se reposer si cette encyclopédie du rock n’avait pas été si énervée. Pendant 1h30, Christophe Brault sautera, dansera, avec une énergie folle pour nous transmettre sa passion pour la musique. Dommage que cette conférence finisse sous des allures de Name-Dropping, au lieu de s’intéresser à l’histoire même du rock garage. Sans notes on finira par se perdre dans cette avalanche de noms, on retiendra au final les compilations Nuggets qui s’intéresse au rock garage de 1965 à 1968 et Children of Nuggets de 1976 à 1995.

Il fait froid, il fait pas beau, on décide de zapper Cankun sur la plage qui n’a pas laissé un souvenir impérissable sur disque pour filer au camping. Arrivé plus tôt que prévu on en profite pour prendre un petit apéro avant de filer voir Jackson Scott. Il faut l’avouer, on arrivera un petit à la bourre devant la scène des remparts déjà bien pleine mais suffisant pour nous convaincre de se jeter sur son premier album. Malgrés leurs visages poupons, ces trois gamins ont des gueules de branleurs d’à peine 16 ans ce qui n'est pas tout à fait vrai. Âgé de 20 ans, Jackson Scott est de ces artistes qui font rêver. Il a vite quitté la fac pour se consacrer à la musique. De son propre aveu, il ne connait pas grand-chose en matière de musique indé , il y a pourtant dans ses chansons tous les emprunts possibles à cette mouvance. Ses chansons sont bricolées et branlantes, sales mais terriblement attachantes. Pas étonnant que le pape Bradford Cox l'ai pris sous son aile pour assurer les premières parties de Deerhunter aux Etats-Unis. On reconnait d’ailleurs sur scène le même esprit que dans la tournée Monomania. Ça crache les mélodies, le public est bousculé par les compositions criardes et attachantes. On est sous le charme. Malheureusement le concert s’achève vite et il n’est pas question de traîner afin d’assister au concert de Woods sur la grande scène.

Avec leurs 6 albums en 7 ans (sans compter les nombreux EPs) dans lesquels il n’y a pas grand-chose à jeter, il faut l’avouer, on pouvait compter sur les Américains pour nous balancer une setlist digne de ce nom. Ils piocheront finalement surtout dans le dernier (logique) ce qui n’est pas un mal au contraire. Bend Beyond dégage une atmosphère estivale qui cadre donc parfaitement avec La Route du Rock. Entre ballades pop, virées psychés et titres plus nerveux, Woods a réussi à happer son public dès les premières notes sans jamais le lâcher. Ces musiciens hors pairs vont une heure durant s’échiner à ramener le soleil avec leur pop/folk garage ce qu’ils parviendront à faire au final comme s’exclamera le guitariste. Avec une heure de permission, le groupe se permet parfois de digresser en se lançant dans des instrumentaux hypnotiques jamais lourdingues élevant un peu plus leur niveau de coolitude. Parce que c’est ça qu’on a retenu surtout, ces gars sont cools. Le chanteur avec sa barbe et sa voix haut perchée un peu fausse par moment, l’autre gus avec sa douze cordes, le bassiste avec son harmonica autour du coup... Ouai, Woods c’est trop trop cool.

Moins cool, mais sympa quand même, Efterklang continue sur la grande scène pour un set euh…Gentil ? Voilà deux groupes que tout oppose. Si Woods est le groupe qui parait détendu et faussement négligé, les Danois, eux, la jouent tirés à quatre épingles (avec nœud papillon et tout et tout). C’est carré, sérieux, la chanteuse fait même du lyrique ou presque. Comme Local Natives, Efterklang est un groupe lisse mais heureusement il échappe au maniérisme de ces derniers. En évitant de foutre des chœurs à tout va, en cherchant à exploiter tout leur matériel (et il y en avait) et grâce à des compositions qui ne vont pas toujours dans le même sens, l’emmerdement ferme est évité. Avec ses pointes d’électronica, on écoute leur pop orchestrale avec politesse mais cela ne nous empêchera pas d’aller faire un tour chez le disquaire des ballades sonores ou encore d’acheter un burger froid et pas top (où les serveurs ne parlent pas Français… Chelou…). Bien que l’on voit de la scène d’à peu près partout grâce une sono et des écrans placés derrière la régie son, on n’aura pas toujours été très attentif, FAUT L’AVOUER.

Le concert fini on part en direction de la scène des remparts pour assister au sympathique set des Allah-Las. Encore un groupe à tendance garage et on ne s’en plaindra pas. Parce que le rock aujourd’hui, il est là ma petite dame et pas dans les Efterklang à la con. Sauf qu’en arrivant devant on fait face à un mur. Pas des remparts hein, mais un mur de gens. Bien que les intentions étaient louables, La Route du Rock, victime de son succès, a vu trop juste au niveau de la capacité. Ressemblant, à un entonnoir, le public se trouvera vite cantonné derrière la régie son. Pour l’année prochaine, les programmateurs savent déjà qu’ils vont devoir trouver une autre place. Comme c’est une première, on pardonne. Allah-Las donc, on ne verra pas grand-chose si ce n’est un chapeau mexicain et des maracas, le son est cool et plus énervé que sur disque. On navigue encore dans les 60’s et on a l'impression d'être plus sur la côte Californienne que Bretonne. A défaut de pouvoir se rapprocher, on se casse boire une bière en attendant l’arrivée de la tête d’affiche Godspeed You! Black Emperor.

Légendes du Post-Rock, on peut même dire que  GY!BE est le meilleur groupe du genre depuis qu’il a été créé sans offusquer plus de 30% des gens. Autant dire que le groupe fait l’unanimité dans le milieu (le milieu des gens qui écoute du Post-Rock, soit un milieu pas funky). Qui plus est, les Canadiens sont revenus l’année dernière avec l’excellent Allelujah! Don’t Bend! Ascend! après dix ans d’absence sans perdre de leur rage et de leur beauté. Cependant, malgré toutes ces louanges on reste méfiant car pour les avoir vu avant la sortie de leur dernier disque on s’était pas mal emmerdé et autant dire que ça part mal. Malgré une scénographie soignée (photos d'archives de personnes arrêtées, des messages comme gravés sur du papier qui s’affichent…), le concert peine à se lancer. C’est tout de même ballot de faire une intro de 10 minutes quand on a environ 1h à jouer quand même... ENFIN, débarque Mladic, premier vrai morceau du concert, alors là on est content ! Alors oui ça tabasse et enfin GY!BE prend de la hauteur sauf que 20 minutes plus tard on retombe sur nos pieds à peine après avoir décollé. Ce soir là, on verra le public déserter petit à petit la grande scène, les novices sont partis depuis longtemps mais les fans commencent à suivre devant ce show pas du tout adapté en festival qui aura mis à chaque fois beaucoup trop de temps à se lancer. Malgré toute la bonne volonté du monde on finira par capituler préférant s’éloigner.

Après une pause galette saucisse, qui reste le meilleur investissement à faire sur le site (3 euros, c’est bon et ça remplit le ventre). On va voir l’ami Etienne sur la scène des remparts avec son groupe Zombie Zombie qui propose d’habitude des concerts électro rythmés et vivants qui vous font bouger du pied comme c’est pas possible. Sauf que là, on ne sait pas ce qu’il a bouffé, peut être une galette pas fraîche, mais ça ne marche pas. On a l’impression que le concert ne décolle jamais. Peut être est ce la faute du troisième larron trop accessoire? Du fait d’être compressé devant cette foutue scène? Ou tout simplement parce que le groupe est dans un jour sans? On ne sait pas, en tout cas, Etienne Jaumet a beau souffler dans son saxo, se déchaîner sur ses claviers, on reste insensible à son set de Krautrock dansant auquel il manquait un petit quelque chose afin de passer un grand moment.

Après cet enchaînement de déconvenues, on pouvait compter sur Bass Drum Of Death pour réveiller les ardeurs, mais à la folie qui va suivre peut être pas car le bonhomme va foutre le feu aux poudres. Alors que son deuxième album est plutôt décevant lorsqu’on le compare à GB City qui reste un summum dans le genre Rock Garage (vraiment), ce soir le groupe va livrer un concert électrisant faisant oublier notre déception. Avec sa formation 2 guitares / batterie, les Américains du Mississipi vont conjuguer un set alliant, punk, garage et grunge. Oui, ce soir là, Bass Drum Of Death a fait dans le bourrin, dans l’efficace avec des riffs à te faire sauter jusqu’à n’en plus pouvoir. Avec une setlist partagée équitablement en les deux disques, ces gars ont fait autant plaisir à eux qu’aux fans béats ce soir là. Avec un concert de cet acabit on n’a finalement pas tardé à se joindre à cette fosse et cela peut paraître idiot mais on a rarement été aussi agréablement surpris par les pogoteurs ce soir là. Les gens se poussaient mais étaient heureux d’être là et c’est avec une franche camaraderie que tout le monde se bousculait avec joie, tout simplement un des plus beaux pogos auquel on a pu assister. Concluant sur un Get Found d’ores et déjà mythique, Bass Drum Of Death a en 45 minutes replacé son nom en haut de la relève garage aux côtés de Ty Segall et autres Thee Oh Sees.

C’est complètement lessivé que l’on attend la venue de TNGHT le duo électro qui comprend en son sein Hudson Mohawke. Bien que l’on ne soit pas fan du bonhomme, il faut avouer que ce duo a su attiser notre curiosité à l’aide de ses morceaux putes et frontaux qui ne manquent pas d’efficacité. On pense en particulier à Higher Ground, utilisé d’ailleurs comme sample par Kanye West sur son dernier album. Avant leur arrivé il faudra avouer que temps aura paru long, les jambes sont lourdes, les bars ferment et c’est à ce moment là qu’on se dit qu’un concert sur la scène des remparts auraient été sympa puisque la fatigue commence à se faire sentir. On est idéalement placé quand arrive enfin TNGHT sur scène, qui ne tardera pas à envoyer des grosses basses. Surprise, pas mal de titres incluent des parties rappées, d’ailleurs, plus le concert avance et plus on a l’impression d’écouté une copie du dernier disque de Kanye West plutôt qu’un concert électro, pourquoi pas. Hormis ce détail, on remarque que l’autre moitié, Lunice, passe autant de temps derrière la platine qu’à se faire passer pour un rappeur à grand coup de moulinet afin de réveiller la foule. Las, la recette s’avère sur le court terme assez répétitive et usante. Malgré ces grosses percussions et ces grosses basses, on arrivera jamais à s’enthousiasmer pour cette recette un peu fadasse. Cependant dur de partir sans avoir entendu Higher Ground qui sera finalement que la copie calquée de la version du Kanye West (ils ont passé le mp3 quoi). Usé on retourne sur le camping pour un dernier verre avant de se reposer pour la dernière ligne droite.

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